La friche est un terrain qui n’est pas cultivé, où poussent les fleurs sauvages et les herbes folles. Un lieu où se terre la sauvagine, et sur lequel se complaisent les dernières espèces en liberté. Un sol laissé à l’abandon, qui ne reçoit ni engrais, ni poison. Qui ignore le soc de la charrue.

Autant dire, vous l’aurez aisément deviné, que les créateurs auxquels est consacré ce modeste site ne figurent pas sur le fronton des temples de l’art officiel et labellisé. Il s’agit essentiellement de personnes de modeste condition: artisans, ouvriers, paysans ou marginaux. N’y voyez surtout pas des excentricités dépourvues de sens, ou de simples objets de curiosité. Vous vous tromperiez lourdement! Dans cette société terriblement organisée, où le cauchemar sera bientôt remboursé par la sécurité sociale, ils nous offrent le rêve! Dans un monde désenchanté, ces hommes et ces femmes nous ouvrent les portes du merveilleux. A travers ces œuvres qui conjuguent jubilation et subversion, ils révèlent une inventivité débridée. Voyons-y les manifestations d’une imagination sans borne et délivrée de toute contrainte.




Joe Ryczko.



mercredi 26 mai 2010

Jean-Michel Chesné expose à l'atelier de Joseph Kurhajec ce samedi 29 mai 2010.


Portes ouvertes à l'atelier de Joseph Kurhajec 58 rue Didot, 75014 Paris (Métro Plaisance).
Jean-Michel Chesné y expose ce samedi 29 mai 2010 de 14h à 18h.

lundi 10 mai 2010

Jean-Michel Chesné. "L'art à la cave et au jardin" à Villiers sur Loir du 13 au 16 mai 2010.



Vous pourrez retrouver Jean-Michel Chesné lors des portes ouvertes de la coopérative viticole de Villiers sur Loir où il exposera avec d'autres artistes du 13 au 16 mai 2010.

L'occasion de venir déguster également les vins du Vendômois.

mercredi 5 mai 2010

Frédéric Allamel: "Imaginaires Zinguifères". Variations autour de Fernand Michel, artiste-zingueur.


« Artiste résolument hors normes et à la frontière de l'art brut, Fernand Michel demeure étroitement associé à son matériau de prédilection: le zinc. Explorant les possibilités inépuisables de cette matière d'autant plus insolite qu'elle en devint exclusive, son œuvre zinguée révèle un imaginaire des plus féconds, où le profane côtoie le sacré, et où la poésie de Saint-John Perse voisine avec les bestiaires fabuleux d'Henri Michaux. De ses poupées plantureuses et vertigineusement fétichistes jusqu'aux gravures illustrant des poèmes de Raymond Queneau, en passant par l'architecture et ses "peintures d'une nuit", ce livre est conçu à la manière d'un catalogue irraisonné, au diapason du personnage, flamboyant et qui fit de l'esprit surréaliste un art de vivre de tous les instants. »

[Contact: "ADABS" Association pour le Développement de l'Art Brut et Singulier, 8 rue de Lunaret 34000 Montpellier. Tél. : 04 67 66 32 40 - Fax : 04 67 60 60 27.]

samedi 1 mai 2010

Accostez avec Lacoste!

Le musée d’Art Naïf de Laval présente, jusqu’au 4 juillet, une très belle rétrospective de l’œuvre d’Alain Lacoste. Le visiteur y découvre, à travers une sélection rigoureuse et un accrochage particulièrement réussi, plus de quarante ans de création. Cet événement est exceptionnel car Alain Lacoste est un des précurseurs, en France, de cet art appelé ‘Singulier’, mais son travail est très rarement montré. «Les artistes ne sont pas faits pour amuser la galerie» aime-t-il nous dire, avant de rajouter : «Je me suis trop souvent brûlé les ailes aux vitrines des m’as-tu vu». Madame Antoinette Lefalher, responsable du Musée de Laval, a su le convaincre de nous montrer son travail.
Alain Lacoste est originaire de cette ville de Laval (Mayenne): contrée qui a vu naitre Le Douanier Rousseau, Henri Trouillard, Robert Tatin, et plus près de nous : Antoine Rigal, Gustave Cahoreau, etc… On peut se poser la question sur le pourquoi de ce creuset de créateurs «Hors Les Normes» en Mayenne? Il y aurait tout un travail à effectuer sur ce sujet, et le Musée d’Art Naïf de Laval, par cette exposition sur Alain Lacoste, montre son intérêt pour cette mouvance artistique. Nous constatons que l’Art Singulier est rejeté par les institutions présentant l’art ‘officiel’ et, parallèlement, il est également rejeté par les institutions présentant l’Art Brut (Lausanne, Villeneuve d’Ascq). Voilà donc ces auteurs d’Art Singulier devenus les plus marginalisés… Alors, pourquoi pas une forte ouverture du musée de Laval à cette forme d’Art? Laurent Danchin, auteur de nombreux articles et livres sur le sujet, et présent au vernissage de cette exposition, ajoutait: « Si cela ne se fait pas à Laval, cela se fera ailleurs … ».


Michel Leroux.


Monsieur Guillaume Garot, Maire de Laval, s’entretenant avec Alain Lacoste. Discutent-ils de l’ouverture d’un Musée d’Art Singulier à Laval?

Visitez le site des musées de Laval pour obtenir plus d'informations sur la rétrospective de l'oeuvre d'Alain Lacoste.

[Photographie: Michel Leroux.]

mercredi 28 avril 2010

Gérard Sendrey: "Fais moi un cygne".




« Fais moi un cygne »

Dessins de Gérard Sendrey.

Du 21 mai au 21 juillet 2010,
Au Couvent des Méduses,
51 avenue Louis de Foix,
64100 Bayonne.

Le vernissage se tiendra le samedi 22 mai à 18h en présence de l’artiste.

Un aperçu de l'homme et de ses créations dans cette entrevue enregistrée à l'occasion d'une rétrospective de l'oeuvre de Gérard Sendrey organisée au sein du Musée de la Création Franche de Bègles, en début d'année 2010. (Source: francetv.fr/culturebox).






Pour plus d'informations rendez-vous sur le site du Couvent des Méduses, (désormais sur le site du Poteau Rose) où se tiendra l'exposition.

vendredi 9 avril 2010

Alain Lacoste. "Les lacosteries".

Article paru dans "Les Friches de l'Art" numéro 15.


J’ai toujours aimé ses compositions hardies. Ses lacosteries pleines de drôlerie ou de pure fantaisie m’enthousiasment. Le personnage facétieux, parfois loufoque, mais qu’on devine austère, aime à manier la plume. Ses aphorismes, ses sentences, ses pensées calamiteuses font mouche. Ses propos à la fois lucides, légers, et graves révèlent une personnalité des plus insolites. Lacoste a le goût de la voltige et cultive l’art de la pirouette. L’homme redoutable, promène un regard sans concession sur la création contemporaine et sur lui-même. Attitude certes mal commode mais combien salutaire.

Joe Ryczko.


A découvrir ci-dessous, quelques écrits et dessins d'Alain Lacoste:




A L A I N F L A N E R I E S


Pierre peint le cœur des pierres.

Pétrir, pétrification, putréfaction.

La mer a besoin de la plage pour devenir artiste.

Ecolos, laissez nous quelques déchets.

Ce qui est arrivé est trop évident.

Pousser l’anthropomorphisme jusqu’à l’absurde.

Mon problème, ce n’est pas le multiple, c’est le singulier.

Gargantua de papier.

Grand pendeur d’andouilleries.

Certains jours on grapille dans l’atelier.

Imiter la nature non dans sa relativité mais dans ses procédés (les montagnes, les plages, les racines).

Trop de blanc nuit.

Dans la précipitation on fait les meilleures choses.

Les artistes romans eux aussi, ils faisaient les arbres comme des feuilles. La feuille n’est pas l’arbre mais le résumé.

La bûche a déjà une forme de flamme.

Nos armoires ont toujours grincé, Dieu merci.



Alain Lacoste.



Alain Lacoste. "Le Veilleur inutile": rétrospective à l'Espace Scomam de Laval (France) du 10 avril au 4 juillet 2010.


Cette rétrospective est organisée par Laval, patrie d'Alfred Jarry, d'Henri Rousseau et ville natale d'Alain Lacoste. Elle regroupe plus de 190 oeuvres d'une figure majeure de l'art des singuliers: collages, peintures, sculptures et assemblages. un vrai feu d'artifice!

Cliquez ICI pour obtenir plus d'informations en vous rendant sur le site des Musées de Laval.



dimanche 21 mars 2010

Billet d'humeur.

Depuis un quart de siècle, l'animateur du blog à l'enseigne de l'unijambiste, un vieux de la vieille des chemins creux et bas côtés, fait des tentatives pathétiques pour imposer l'art immédiat, concept fumeux dont il a fait son mètre-étalon, pour mesurer on se demande bien quoi. On ne présente plus celui qui pourrait prendre pour devise: "bon pied? mon oeil!" On connaît son sectarisme, sa légendaire finesse et son ouverture d'esprit...Il n'a pas son pareil pour les formules malheureuses et les propos désobligeants. Comme si on pouvait tous avoir le même mauvais goût. C'est en quelque sorte sa marque de fabrique. Dénigrant les uns, pratiquant l'auto-encensement, notre Zoïde au petit pied se pose en censeur. Pour rendre ses oracles notre pythie devrait au préalable travailler ses dossiers. Mais l'unijambiste fait également dans l'approximatif. Je me dois donc d'éclairer sa lanterne: le numéro 36 des Friches de l'Art est déjà paru alors qu'il cite le numéro 33... Le plus drôle, c'est qu'il juge du contenu des Friches de l'Art à partir de trois livraisons datant de 1994... On jugera du sérieux de sa démarche. A moins qu'il ne soit doué de la double vue... Les internautes apprécieront. Quant à ses considérations sur le blog des Friches de l'Art, elles comportent autant d'erreurs que de doigts à mon pied. Chapeau l'artiste! Notre ami devrait raboter les contours de son ego surdimensionné! Son propos méritait une réponse immédiate. Voilà qui est fait.

Joe Ryczko.

mercredi 17 mars 2010

Eléments temporels: Claude Massé au Manoir des Renaudières du 6 mars au 4 avril 2010.



Né en 1934 à Céret, Claude croisera, durant son enfance, les artistes et créateurs qui rendaient visite à son père, l’écrivain Ludovic Massé. La rencontre avec Raoul Dufy en 1947 s’inscrit au premier plan. Dès l’âge de 19 ans, il part travailler dans une agence de presse parisienne. Les rencontres formatrices continuent, avec les peintres Bissière, Schneider, Kumi Sugaï ou des poètes comme Henri Pichette.
L’année 1958 voit disparaître sa mère, Louise. Il rencontre Henri Michaux, puis entame avec Jean Dubuffet une correspondance qui ne cessera qu’en 1985. Claude Massé et Catherine Moro se marient en 1961. Il commence alors à s’intéresser à cet art qu’on dit « autre », par des travaux sur Nataska, Jean Pous, René Guisset, Marcel Manent… Il collaborera entre 1960 et 1985 avec pas moins de 27 créateurs roussillonnais, représentatifs de cette voie. Catherine met au monde leur fils Christophe en 1961.
Travaillant à la bibliothèque de Perpignan à partir de 1963, Claude Massé écrit de la poésie et réalise ses premiers collages. Directeur du Musée d’Art Moderne de Céret entre 1967 et 1972, il y organise de nombreuses expositions, occasions de rencontrer encore de prestigieux artistes comme Chagall, Picasso, Masson et Desnoyer. Il correspond avec avec René Char. L’œuvre personnelle s’entrevoit à partir de 1974, avec des séries de cartons collés, de colis postaux et plusieurs biographies. Les premiers Patots voient de jour en 1979. La première exposition personnelle de Claude Massé a lieu en 1981 à Andorre La Vella.




Ludovic Massé, l’écrivain et père vénéré, décède en 1982. Claude commence alors une autre œuvre, plus intime encore, sur les travaux de son père. Après une exposition à Barcelone en 1983 commencent à s’enchaîner les présentations de son travail personnel. Il quitte bientôt le cadre européen. Une production prolifique ahurissante déferle depuis le petit atelier de Perpignan, devenu Centre du Monde de « l’Art Autre » : 30 livres illustrés, 2500 dessins, 7000 collages, et 45000 lièges de toutes tailles.
Claude Massé, dont les œuvres sont propriétés de musées et de collections privées dans de nombreux pays, donne des conférences, participe à des colloques, réalise des installations dans le monde entier. Il continue d’arpenter et de nous livrer le cadastre de son monde intérieur infini, chérissant l’œuvre de son père et la sienne avec la même ténacité et la même humilité…

Source : L’Agenda de Carquefou n° 223, mars 2010 (www.carquefou.fr).

Claude Massé expose du samedi 6 mars au dimanche 4 avril 2010 inclus, au Manoir des Renaudières, à Carquefou.


(Illustrations: Patots, Claude Massé)

lundi 15 mars 2010

L'Art Brut Japonais au musée de la Halle Saint Pierre du 24 mars 2010 au 2 janvier 2011.

Cliquez ICI pour accéder au site de la Halle Saint Pierre.

"Les inspirés en soutane" par Jean-Michel Chesné et Jean-François Maurice.


Voilà un ouvrage remarquable à plusieurs titres. D'abord, le livre est bien conçu. Les illustrations rassemblées par Chesné sont surprenantes. La lecture de ce Gazogène est fort plaisante. J'en aime les analyses étayées par une solide érudition. Elles reposent sur un sérieux travail de recherche. En fait, c'était un champ neuf à explorer. En cela, la démarche de Jean-François Maurice est originale. Ses points de vue, défendus avec brio, sont justes. Je recommande vivement la lecture de ce numéro de Gazogène.

Joe Ryczko.

Contactez Jean-François Maurice:
- en vous rendant sur le blog de Gazogène
- à l'adresse postale suivante: Jean-François Maurice, Le Bourg, 46140 Belaye
- à l'adresse électronique suivante: jfmaurice@laposte.net
Contactez Jean-Michel Chesné:
- en vous rendant sur son blog
- à l'adresse électronique suivante: jmchesne@libertysurf.fr

Ataa Oko et Frédéric Bruly Bouabré: deux créateurs africains à l’honneur à la Collection de l’Art Brut de Lausanne (5 mars – 22 août 2010).




Le Ghanéen Ataa Oko se lance dans la création graphique à l’âge de quatre vingt trois ans.


Il commence à dessiner de mémoire des cercueils figuratifs personnalisés qu’il a réellement construits dans son passé d’artisan menuisier. l’un en forme de poisson pour un pêcheur, un autre en forme de tomate pour un paysan. Dans ses compositions, il s’affranchit peu à peu de ses souvenirs, pour laisser place à un foisonnement de nouveaux motifs iconographiques vivement colorés : animaux, personnages, fruits ou êtres imaginaires, parfois monstrueux.


Visité
par
les
esprits,
en
constante
relation
avec
l’au-delà,
Ataa
Oko
chemine
également avec des entités spirituelles, qu’il représente sur son papier. Celles-ci sont assorties de projections mentales et de divagations vivifiantes, mais aussi de banales et fécondes représentations du quotidien, qui agissent comme des signes propices à stimuler son imagination.


L’œuvre prolifique de Frédéric Bruly Bouabré est née d’une vision céleste survenue à Dakar il y a plus de soixante ans et qui, dit-il, a illuminé sa vie. Les créations de ce poète, dessinateur, conteur, et penseur ivoirien comprennent notamment un ingénieux alphabet élaboré à partir de sa langue, le bété. Ce système, formé de 449 pictogrammes auxquels correspondent des syllabes, lui permettent de consigner les langues du monde entier. Dans sa démarche universaliste, Bruly Bouabré s’adonne également à une quête philosophique et poétique. Il catalogue les scarifications, relève d’innombrables signes sur la peau d’une banane, l’écorce d’une orange, sur une noix de cola, ou encore dans la forme d’un nuage; il y voit l’explication du monde.
L’auteur les retranscrit, aujourd’hui encore, à Abidjan, alors qu’il est âgé de quatre vint sept ans. Les travaux de Frédéric Bruly Bouabré réalisés avec une économie de moyens disent l’essentiel. Stylo à bille et crayons de couleur en main, le créateur intervient dans un style synthétique sur des feuilles de papier cartonné, de la dimension d’une carte postale pour la plupart. Ses compositions jouent à la fois sur l’écriture et le dessin - alliant le verbe et l’image - et contiennent une dimension édifiante et spirituelle.

Source: site de la Collection de l'Art Brut de Lausanne (http://www.artbrut.ch/).

Cliquez ICI pour vous rendre sur le site de la Collection de l'Art Brut de Lausanne.

mardi 5 janvier 2010

Gabrielle Decarpigny.

Article paru dans "Les Friches de l’Art " numéro 32.



Elle tient une boutique de jouets à Bagnères de Bigorre, aux pieds des Pyrénées. Elle ignore tout du monde de l’art. Entre deux clients, dans l’arrière boutique, à l’abri du regard des autres, Gabrielle Decarpigny se livre à un singulier rituel. Elle s’installe à une table, se saisit d’un bout de carton ou d’une feuille de papier et attend. Bientôt sa main s’anime, à son insu, et trace d’étranges dessins. Elle crée sous dictée, sans idée préalable, ne sachant où elle va. Une force l’habite et prend possession de sa main : en quelques minutes elle décrit des volutes, des arabesques, des enchevêtrements d’où apparaissent des visages ou des silhouettes.
Au début, elle était quelque peu effrayée par les
résultats obtenus et se gardait bien d’évoquer ces expériences. Mais rassurée par une amie qui lui parle d’écriture automatique et de création médiumnique, elle va continuer à pratiquer ces séances durant des années, mais toujours dans le plus grand secret, tout en se posant maintes questions sur l’origine et le sens de ses dessins bizarres.
Un de ses proches, devenu internaute, lui parle un jour d’une galerie genevoise qui expose des œuvres curieuses. Un contact est pris avec Flora Berne. C’est le début d’une aventure nouvelle, tandis que le mystère Decarpigny demeure.


Joe Ryczko.



(Illustrations: Gabrielle Decarpigny. En haut: "les foules"; au milieu et en bas: "les entrelacs". Source: http://www.gabriellede.com/)

Cliquez ICI pour accéder au site de Gabrielle Decarpigny.

De l'art paléolithique contemporain.

Article publié dans "Les Friches de l'Art" numéro 34.




« Bien des paléontologues humains ou des préhistoriens sont en fait des poètes. Seulement, ils ne l’avouent pas toujours ».
André Leroi-Gourhan.



L’aube de l’art se situe sans doute au paléolithique supérieur. Mais ses origines sont plus anciennes encore et resteront à jamais ignorées. Quelques créateurs contemporains, qui s’efforcent de remonter aux sources de l’art, tentent de recréer,
de restituer ce qu’ils s’imaginent être les premiers balbutiements de l’art. Nous ne connaîtrons, bien sûr, jamais la réalité de celui-ci. Toutefois, rien ne nous interdit de l’imaginer. Le paléolithique constitue ainsi une prodigieuse source d’inspiration. Un formidable stimulus. Un temps mythique qui excite l’imagination et la rend propre à réinventer, à recréer l’art élémentaire d’alors. Plutôt que de penser le renouvellement de l’art occidental à partir de modèles extérieurs comme ce fut le cas au début du vingtième siècle, il est possible de tenter de le faire à partir de l’art paléolithique, ou de l’art supposé tel. Car si nous connaissons la réalité concrète de l’art océanien, de l’art africain ou de l’art aborigène australien grâce aux collections visibles dans nos musées, il n’est guère aisé de se faire une idée exacte de ce que fut réellement l’art paléolithique. En effet, nous n’en connaissons que des bribes, ou de rares témoignages. Certes, des peintures pariétales, des gravures subsistent et quelques sculptures ont été découvertes ici ou là. Toutefois, la totalité des œuvres réalisées sur des supports périssables a disparu à tout jamais. Mais c’est précisément cette ignorance, cette rareté, cette connaissance lacunaire de l’art paléolithique, qui constituent puissamment l’imagination. Cette recherche aléatoire d’un art archaïque, que par goût du jeu et par référence à Joseph Delteil, nous appelons paléolithique contemporain, joue aujourd’hui le rôle dévolu à l’art nègre au siècle précédent. Il faut y voir le moyen de recréer l’art de ce temps. Ce que nous ont enseigné les cultures extra-européennes a fécondé l’art du vingtième siècle. Il nous faut tenter de trouver ce que peuvent nous apporter les cultures européennes du passé lointain. Ultime quête pour un nouveau recommencement. Ce retour à l’archaïsme, perceptible dans tout l’art actuel, se révèle être une manière de contester la modernité dans sa forme techniciste, rationaliste, et matérialiste. C’est aussi, pour l’artiste, l’occasion de repenser son rapport au monde et de se mettre en harmonie avec lui. La fonction de l’art n’est elle pas d’ouvrir le champ de la conscience à autre chose que la perception rationnelle de la réalité? Dans un monde en proie au désenchantement, se fait sentir le besoin de réintroduire une part de rêve, de magie, de mystère dans l’art. Renouer avec des supposées traditions esthétiques fort éloignées dans le temps et situées dans un autre espace culturel serait donc une façon d’en finir avec la tyrannie de l’innovation, de s’affranchir de la recherche de la nouveauté pour la nouveauté. Cette préoccupation est partagée par nombre de créateurs contemporains dont la démarche se nourrit de la nostalgie des temps passés ou la transcendance du divin imprimait la trace du sacré dans l’œuvre la plus humble. L’homme a besoin d’un art à son échelle dans lequel il puisse retrouver une dimension spirituelle.
Joseph Delteil, en s’installant à la Tuilerie, rêvait de redevenir le premier homme. C’est là qu’il
rédigea son livre fameux intitulé « la cuisine paléolithique ». « C’est la cuisine qui apparaît dès le commencement, par pur instinct, simple appétit, entre l’homme et le monde » écrivait-il alors. « La civilisation moderne, voilà l’ennemi ! Il s’agit de redevenir des sauvages, vierges de sens et d’esprit comme au premier matin » ajoutait-il avec le brio que nous lui connaissons. Ce qu’il préconisait pour l’art du manger, nous le revendiquons pour les arts plastiques. C’est dans cet esprit-là que nous avons choisi d’utiliser le terme de paléolithique pour qualifier cette démarche artistique néo-primitiviste. C’est aussi une manière d’en finir avec le concept d’avant-garde complètement dépassé, et de faire un pied de nez à l’histoire de l’art. En la matière, tout indique que l’évolution s’effectue sur un mode buissonnant et non pas linéaire. Privilégier cette recherche, c’est faire le choix d’un art attaché à la finitude de l’homme. Ce voyage dans les lointains intérieurs nous paraît plein de promesses.


Joe Ryczko.


(Illustrations: de haut en bas, peinture aborigène, Joe Ryczko, Jean Vodaine, Ian Pyper, Jean-Pierre Sokolowski, Michel Nedjar).


Cliquez ICI pour vous rendre sur le site de Ian Pyper.
Cliquez ICI pour accéder au site de Michel Nedjar.



vendredi 14 novembre 2008

A la friche cette semaine: Bernard Le Nen.

Je reste subjugué par les peintures de Bernard Le Nen. Ses personnages morts de peur, bouffis d’angoisse ont une force d’expression incroyable. Sur fond noir, les saynètes qu’il peint relèvent du fantastique, du surréel. Ses visions cauchemardesques sont aussi fascinantes que déroutantes. L’homme et sa place dans le cosmos, l’homme et sa condition absurde, l’homme et ses peurs ancestrales sont au centre de cette œuvre tourmentée mais combien puissante.

Il nous montre des monstres, des êtres difformes dans des positions incongrues et saugrenues. Il se plaît à peindre des personnages étranges, des situations cocasses, burlesques ou désopilantes. L’imagination de Bernard le Nen n’a pas de limite et l’onirisme habite toute sa création. Comment rester insensible devant les figures pathétiques, hallucinées ou grotesques peintes par cet artiste visionnaire? Comment ne pas se reconnaître dans ces créatures constamment reliées à la bestialité et à un univers qui les écrase? Nous sommes là en présence d’un travail d’une singulière inventivité. Le Nen conjugue avec un art consommé l’humour noir, la loufoquerie, le tragique et le non-sens. Bernard le Nen est décidément un artiste rare.


Joe Ryczko.
















(Illustrations: Bernard Le Nen. De haut en bas, "La mort du chat", sans titre, "Têtes creuses". Source: http://www.artgument.com/)



Cliquez ICI pour vous rendre sur le site du peintre Bernard Le Nen.
Cliquez ICI pour vous rendre sur le site de la galerie "Artgument", dont l'expo "La Faim de l'Art" débute dès demain, samedi 15 novembre, et se tiendra jusqu'au 4 décembre.